Spaghetti all’amatriciana (Spaghetti à la façon d’Amatrice)

Porc

Vous connaissez le dicton « tout est bon dans le cochon »? Et bien, rassurez-vous, jamais la tradition populaire n’a été plus vraie. Et ce depuis belle lurette (disons à partir de 8.000 avant J.-C). Sur le site de Hallan Çemi Tepesi en Turquie, les archéologues ont trouvé des traces de l’élevage des cochons qui remonte à cette date, antécédente à la culture du blé et de l’orge. Et pour cause. La petite bête rondelette (à l’époque les monstres de laboratoire d’aujourd’hui n’existaient pas) s’adapte à tous les terrains et à tous les climats (des forêts aux terrains arides) et est bien plus rentable que la vache ou le mouton.

Les Romains l’avaient bien compris, puisqu’ils utilisaient sa chair pour nourrir la population de Rome et les légions toutes entières. L’une des plus grandes gentes de l’époque républicaine, la Porcia, en tirait son nom et Cicéron en personne, dans De natura deorum (II, LXIV), en faisait l’éloge : « la nature n’a point fait d’animal plus fécond que celui-là. »reatino De nos jours en Italie, il existe six races autochtones : calabrese, casertana, cinta senese, mora romagnola, nero siciliano et sarda. Et des sélections sont en cours pour recréer la race noire de Parme et la pugliese, en plus des 22 autres qui ne sont pas inscrites au registre du ministère de l’agriculture.

D’ailleurs les Italiens en raffolent en antipasto, en primo ou en secondo piatto, voire même en dessert (il sanguinaccio de Basilicata, à base de chocolat fondant et de sang frais de porc…). Pour rester dans la tradition culinaire la plus courante, je vous propose un plat de pâtes, mais pas n’emporte lequel.

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Les pâtes à l’amatriciana sont cuisinées dans le centre de la péninsule. Elles naissent à Amatrice, petit bourg de la province de Rieti, au nord-est de Rome. Ce plat fait partie des grands classiques de la cuisine romaine (comme la carbonara ou la coda à la vaccinara), mille fois revisité et toujours présent sur les tables des seigneurs comme des paysans. Et pour cause. Les ingrédients sont peu nombreux, mais de choix : des pâtes (des spaghetti et pas autre chose), du fromage pecorino (mais attention, pas le romano, très salé, plutôt le sarde doux ou le local), des tomates concassées (si on est en hiver), un piment rouge, et bien évidemment lui, le cochon.

Et là les choses se compliquent, du moins à Paris. Et oui, parce que dans la recette originale il faut de la bajoue, le guanciale, un morceau de viande maigre peu salée avec du gras noble, de composition différente que le lard ou la poitrine fumée. Les Français n’utilisent pas ce morceau pour leur charcuterie (d’où mes recherches auprès des épiciers italiens), mais son utilisation est essentielle pour ne pas altérer le goût de l’ensemble. Il vous faudra aussi cuisiner avec du saindoux (doux et délicat) et non de l’huile extra vierge d’olive (trop acide).francobollo Neuf fois sur dix, au restaurant, la recette originale est dénaturée : on utilise de l’huile d’olives, de la poitrine fumée (à la place du guanciale), de l’oignon et du parmesan. Mais ce serait faire du tort aux gens d’Amatrice que de pervertir leur recette qui existe probablement depuis le XVIIe siècle. Celle-ci n’a été modifiée qu’avec l’arrivée de la tomate dans la péninsule : on trouve la première mention de la sauce rouge en 1790 dans le manuel du chef Francesco Leonardi. La recette (avec bajoue et pecorino sans tomate) telle qu’elle existait avant l’apparition de la tomate s’appelle la griscia, vient (peut-être) de Grisciano (aux alentours d’Amatrice), et elle n’a pas disparu.

Je sais que vous piaffez de passer à table, alors voici les instructions. Coupez un morceau de saindoux et mettez-le à chauffer à feu doux dans une poêle.Spa 2

Entre temps, coupez la bajoue en fines lamelles. Lorsque le saindoux sera dissout, ajoutez-les dans la poêle, et attendez qu’elles aient doré. Touillez à l’aide d’une cuillère en bois pour éviter qu’elles collent au fond.Spa 3

A présent, ajoutez le petit piment rouge (frais, si possible), et les tomates concassées (j’ai aussi ajouté du poivre noir moulu), et laissez mijoter la sauce pendant une dizaine de minutes (elle doit bien réduire).

En attendant, râpez le fromage et mettez à chauffer l’eau pour les pâtes. Pour des spaghetti al dente, il faut calculer normalement 11-12 minutes (cela dépend de la marque).

Après la cuisson, ajoutez les pâtes à la sauce, touillez et parsemez le tout de pecorino (éventuellement enlevez le piment).
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Dans l’assiette, ajoutez encore du fromage, pour le plaisir de l’oeil et du palais.
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Pour accompagner ce plat, vous pouvez opter pour un vin rouge, ou encore du blanc, un Colli Albani A.O.C., produit dans le Latium.colli albani

Ingrédients pour 4 personnes :

400 gr. des pâtes (spaghetti)

250 gr. de bajoue de porc

500 gr. de tomates fraiches, voire une boite de tomates concassés

150 gr. de fromage pecorino (d’Amatrice, ou sinon un autre mais toujours doux)

1 cuillère de saindoux, 1 piment rouge (et du poivre, si vous voulez)

du gros sel pour les pâtes

2 commentaires sur “Spaghetti all’amatriciana (Spaghetti à la façon d’Amatrice)

  1. Je suis infiniment triste pour nos amis italiens d’Amatrice et des autres villages qui souffrent.
    J’aime cette recette et bravo pour votre blog, c’est une mine de gastronomie et de culture italienne.
    Meilleures pensées.

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