Au début de ma jeunesse universitaire romaine, j’allais souvent à la pizzeria. Cela ne coûtait pas cher, et j’y avais découvert, moi graeculus du sud de l’Italie, un hors d’oeuvre jusque là encore inconnu : i fiori di zucca (littéralement les fleurs de courge). Dans ma naïveté, j’ai cru pendant des années que je mangeais de la fleur de courge alors que c’était des fleurs de courgettes. Bon, j’en vois qui rient sous les moustaches…mais combien de gens connaissent l’histoire de ce légume ?
Tout d’abord, il y a les courges eurasiatiques et leurs correspondantes américaines. Les premières, Lagenaria siceraria, sont originaires probablement d’Afrique (comme le melon et la pastèque). Connues déjà des Romains sous le nom de cucurbitae, elles étaient cultivés en France au Moyen-Age. Les deuxièmes, Cucurbita pepo, appartiennent à la variété redécouverte après le XVIe siècle et importée en Europe avec les citrouilles…et les courgettes, qui sont consommées avant leur complète maturation, d’où l’italien zucchina (littéralement « petite courge »). En Italie, on en raffole, au point d’en avoir sélectionné plusieurs types : noire de Milan, verte de Florence, jaune de Sicile, ronde de Plaisance. Et c’est mieux ainsi, puisque elles sont composée par la plupart d’eau, riches en vitamine P, excellentes pour le cholestérol, pas chères…
Les fleurs de courgettes sont délicieuses mais on en trouve peu sur les marchés car elles sont si délicates qu’elles ne souffrent quasi aucun transport. Il existe, en vérité, deux types : les masculins et les féminins. Les premiers s’ouvrent au sommet d’un long pédoncule qui a le même diamètre du début à la fin, alors que les secondes se trouvent au sommet d’un petit appendice qui ressemble à une minuscule courgette. Les fleurs masculines sont mieux adaptées aux beignets… mais je n’ai trouvé que des féminines.
Ce n’est pas grave. Ce qui compte, c’est d’avoir une fleur à la couleur encore vivace et aux pétales sinon ouverts, du moins pas repliés vers l’intérieur. Bien sûr, il y a plusieurs façons de préparer les beignets, de Nice à la Sicile. Ma recette est très simple, à la fois traditionnelle et légère. Il suffit d’abord de laver et sécher les courgettes et de détacher la fleur du fruit…
Il faut ensuite retirer les pistils en écartant très délicatement les pétales…
…et mettre de côté des mozzarelle coupées en petits morceaux et des filets d’anchois qui viendront exalter le goût de la fleur.
Il s’agit donc de remplir chaque fleur avec quelques deux-trois morceaux de mozzarella et les deux tiers d’un anchois, avant de la refermer comme un bonbon.
Après quoi, il faut préparer la casserole pour frire. Etant donnée la quantité d’huile à utiliser, il est peut-être envisageable de choisir un huile de tournesol, ou de colza, qui est aussi plus légère en bouche que l’huile d’olives…
Passons à la pâte à beignets. J’ai opté pour une version très légère, de type tempura (à la japonaise) : pour l’obtenir, j’ai mélangé de la farine de blé dur tamisée, avec un œuf, et versé tout doucement de la bière blonde glacée, en touillant à l’aide d’une fourchette.
Quand vous aurez obtenu un composé lisse mais un peu épais, il suffira d’y tremper la fleur de courgette quelques instants (en la tenant avec les doigts).
Puis de frire les fleurs dans de l’huile bien chaude (deux ou trois à la fois) jusqu’à qu’elles soient bien dorées (trois-quatre minutes devraient suffire).
Vous pourrez les déposer sur un feuille de sopalin et les parsemer de sel.
Pour les accompagner, vous avez le choix entre un vin sec, et une bière blonde, possiblement artisanale. Durant ces dernières années, l’Italie a vu sa production exploser, et ce ne sera pas difficile en trouver une à votre goût.
Ingredients : 12 fleurs de courgettes; 100 gr. de farine de blé dur, six anchois; 1 mozzarella; 1 bière; 1 œuf; huile de colza, sel