Dans toute l’Italie, en ce moment, il fait une chaleur torride. Bien évidemment, dans ces conditions, il est presque impossible de se mettre à table, mais les Ritals sont des gourmands durs à cuire, vous le savez. Ils s’obstinent à avaler, coûte que coûte, la totale : primo, secondo, contorno, frutta, caffé, et… desserts. Souvent élaborés, c’est une exception nationale, avec de la ricotta. Cette préparation laitière, délice connue chez nous déjà aux temps de Caton l’Ancien, peut être de vache, de brebis ou même de chèvre. Elle est savourée salée ou sucrée, fraîche ou affinée, des Alpes à la Sicile. Pour vous mettre d’emblée l’eau à la bouche, il suffit de citer le saras del fen, dessert des Vallées vaudoises dans la province de Turin accompagné de confiture de myrtilles, de sureau ou de miel, ou les cannoli siciliens…
Personnellement, je supporte mal la chaleur. Une petite salade et je vais directement à la case dessert. Je me suis inspiré d’une recette à base de ricotta gelée de pecora (brebis) du Latium, région qui est en tête de liste pour les produits laitiers et les fromages de toutes sortes, très prisés même à l’étranger. Pensez donc : sept pecorini ‘romains’ sur dix vendus aux Etats-Unis sont faux. Chaque année, 25 millions de kilos de « romano cheese » de brebis, produits dans le big country, et pas de tout à Rome et ses alentours. Vous comprendrez mon inquiétude lorsque j’ai dû chercher à Paris de la vraie ricotta di pecora laziale, qui est produite, il faut le souligner, avec le lait de quatre types différents de brebis, la Sarda, la Comisana, la Sopravvissana, et la Massese, qui broutent ces pâturages régionaux. La vraie ricotta laziale est garantie par un consortium qui a imposé un label de garantie D.O.P. (dénomination d’origine protégée). Les garde-fous, dans l’agro-alimentaire italien, ne sont jamais suffisants.
Enfin, une fois le Graal trouvé, j’ai aussi dû me procurer quelques moules pour façonner le dessert bien nommé. Chose pas évidente non plus, puisque dans le commerce on a facilement des tout petits moules (type cannelé), ou des très grands (type brioches)… J’ai opté pour des moules de 10 cm de diamètre supérieur.
Tout d’abord, il m’a fallu passer la ricotta au tamis, pour obtenir une texture plus homogène et plus fine.
Ensuite, j’ai préparé du sucre glace et des jaunes d’œufs.
Puis j’ai fouetté les œufs et le sucre…et j’ai ajouté la ricotta. Et fouetté encore.
Dernière ajout, une cuillère de rhum.
La crème obtenue doit reposer une nuit entière au réfrigérateur dans le moule, revêtu de papier sulfurisé, et clos avec du film alimentaire.
Le lendemain, j’ai fait chauffer un peu d’eau dans une casserole, et j’ai ajouté du sucre (normal) pour réaliser un sirop.
Pendant qu’il s’épaississait (attention, il ne faut pas faire du caramel), j’ai ajouté quelques figues et des pruneaux secs. Pendant ce temps là, j’ai fait faire à la ricotta un court passage au congélateur, histoire afin qu’elle ne dégouline pas tout de suite avec la chaleur.
Et puis, la touche finale. J’ai versé le sirop sur le dessert gelé de ricotta, avant de servir. Petit détail : je sais que mes photos ne sont pas parfaites (loin de là), et de ce fait les recettes peuvent sembler moins attrayantes que celles des professionnels, mais je peux vous dire que les photos des livres de cuisine ont souvent peu de rapport avec la cuisine réelle. Pour accompagner ce plat, je conseille un vin moscato passito A.O.C. de Terracina, dans le sud du Latium, laissé « sur la paille » pendant plus de deux mois, et puis affiné six mois dans des barriques en chêne.
Ingrédients pour six portions : 700 g. de ricotta romaine, 135 g. de sucre à voile, 5 jaunes d’oeufs, 4 cuillères de rhum. Pour le sirop : 2 dl d’eau, 180 g. de sucre, 6 pruneaux, 6 figues secs.